Flash-back sur notre voyage au Yunnan, qui me semble déjà à des années lumière derrière nous alors qu’il ne date que de quelques mois, et retour sur ce qui a constitué l’un des éléments forts de ce voyage : la rencontre des yunnanais, leur gentillesse, leurs sourires et l’incroyable diversité et richesse de leurs costumes et coutumes traditionnels. Car le sud de la Chine et notamment le Yunnan est habité par plusieurs des nombreuses minorités ethniques du pays. Minorités d’ailleurs constituées parfois de plusieurs millions de personnes, mais qui rapportés au un milliard deux de Han sont un goutte d’eau dans l’océan de la Chine. Goutte d’eau certes, mais étonnamment respectée et intégrée dans le pays : leur langue, leurs coutumes, leurs costumes ne semblent faire l’objet d’aucune tentative de dissolution dans la culture Han, et ces minorités n’ont jamais été soumises à la politique de l’enfant unique, leur accordant un statut d’exception. Je n’ai pas été soudainement frappé d’une admiration inconditionnelle du pouvoir central de Pékin, mais j’avoue que c’est une dimension qui m’a agréablement surprise.
C’est en nous enfonçant dans le sud rural de la province que nous avons pu rencontrer les premiers chinois « non-Han », en parcourant les allées d’un immense marché perdu au fin fond d’une vallée qui nous a coûté de longues heures de route. Notre programme mentionnait sobrement « marché de Mengla ». Nous aimons visiter les marchés, qui révèlent toujours l’authenticité de la vie locale, mais nous ne nous attendions pas à une telle profusion d’images. La partie alimentaire était conforme à ce que nous attendions : beaucoup de légumes, de piments, des étals de viande assez bruts, avec écheveaux de boyaux suspendus à des crochets, des volailles vivantes (petite pensée pour la grippe aviaire), des poissons dans des bassins, avec une impression non seulement d’un autre monde mais aussi d’un autre temps. Impression renforcée par le fait que nous n’avons croisé aucun autre occidental dans cette vallée perdue.
Nous pensions avoir fait le tour quand au détour d’une autre allée nous sommes tombés sur l’autre partie du marché : celle réservée à la vente de tout ce qui n’était pas alimentaire, et en particulier d’immenses allées dédiées aux tissus, rubans, galons, broderies et autres accessoires constitutifs des costumes traditionnels locaux. C’était le moment ou jamais de craquer pour des broderies locales et j’ai fait la journée de quelques vendeuses. Quant au bonheur de l’ethnologue, combien au juste d’ethnies se croisaient là ? Difficile à dire, mais un nombre certain au vu de la diversité des costumes arborés. Portés par des jeunes, des vieilles ou des enfants, dans un style entièrement traditionnel ou mâtiné d’éléments plus modernes – pratiques (doudoune) ou sexy (cuissardes en skaï ou talons aiguille) – ces costumes s’intègrent naturellement dans la vie quotidienne des habitants de la région. Et comme souvent les enfants ont été un moyen d’entrer facilement en contact avec les gens : s’extasier sur la progéniture de son prochain est un langage universel.
Du côté des rizières en terrasse de Yuanyang, ce sont essentiellement les ethnies Hani – d’origine tibéto-birmane et grands constructeurs de cet ensemble de culture en terrasses – et Yi, eux aussi d’origine tibéto-birmane, que nous avons croisés. Et l’une des choses qui m’a immédiatement frappée c’est de voir toutes ces femmes porter des charges lourdes et se consacrer aux travaux physiques les plus durs quand les hommes les regardent faire. C’est que traditionnellement les Hani considèrent que les reins des femmes sont plus solides que les leurs, ils leur laissent donc faire les travaux physiques les plus pénibles. Ce qui me fait dire que les croyances populaires ont bon dos quand il s’agit de tirer au flanc. Toujours est-il que j’étais horrifiée quand les porteurs de notre guest-house se sont révélées être des porteuses et ont chargé nos pesantes valises sur leurs hottes en bambou pour trottiner jusqu’à notre chambre. Un gros pourboire ne fait pas tout.
Sur le site de Shilin – la forêt de pierre, dont je vous parlerai plus tard – ce sont les coutumes et costumes de l’ethnie Sani que nous avons rencontrés. Ils sont là non seulement pour le plaisir des visiteurs – fort nombreux – mais les familles Sani en visite sur le site prennent également plaisir à revêtir leurs costumes traditionnels, ce n’est donc pas qu’une question de folklore pour le touriste. Et sur la Montagne de l’Ouest à Kunming (comme sur tous les sites très touristiques d’ailleurs) il est possible de louer un costume d’une minorité ethnique, avec profusion de choix, pour quelques kuais. Les chinois Han en raffolent et n’hésitent pas à se faire immortaliser.
Ceux que la question intéresse pourront visiter le musée des minorités ethniques à Kunming, mais même sans cela, ce périple au Yunnan nous aura offert une découverte inoubliable de visages et de traditions différentes en Chine. Vous me croyez si je vous dit que de revoir toutes ces photos me donne une folle envie d’y retourner ?
Photos : pour l’ensemble de notre voyage au Yunnan presque toutes les photos sont de MonMeilleurMari, avec tout de même quelques unes de moi.
Je te crois… j’ai envie d’y aller aussi ! Mais j’ai un monsieur à la maison qui n’est pas très aventurier… il me faudra bien quelques années pour le convaincre. En fait j’adore le style hauts talons, collants et protèges mollets, super sexy et très coloré !
Ouh la, mais pas besoin d’être aventurier pour aller jusque là-bas : il y a des aéroports, des autoroutes, des routes en bon état, il faut juste le temps et l’envie, ça suffit amplement 😉
Et pour les talons aiguille, nous aussi on a adoré, c’est d’ailleurs pour ça qu’on l’a photographiée. Sexy et tradi, le mix parfait.
Une facette inconnue de la Chine en tout cas pour moi… Incroyable cette tolérance du régime !
Oui, en tout cas pour les ethnies du sud. Il semblerait que les choses soient moins soft pour ce qui concerne le Tibet et le Xinjiang et que les populations locales sentent beaucoup plus la volonté de sinisation et de marginalisation de leur propre culture. Mais contrairement au Yunnan ces deux provinces ont des volontés indépendantistes, ceci expliquant certainement cela…
Très beau reportage photographique…. tu as pensé à me rapporter quelques rubans ??
Merci pour le compliment, et malheureusement je n’ai pas du tout pensé à prendre des rubans ou des broderies pour d’autres que moi (quel égoïsme !), mais il faut dire que je n’ai pas non plus fait preuve de beaucoup d’âpreté à la négociation et que mes achats ont fini par représenter un certain budget…
Vos photos sont absolument magnifiques! Ca me donne tant envie d’y aller! (En meme temps si je veux arreter d’etre frustree, il faut que j’arrete de lire votre blog, ce qui n’est pas prevu)
Avez vous rapporte un porte-bebe pour votre beaute Mandarine? Ils sont si beaux!!!
Quant a la tolerance du gouvernement central vis a vis des minorites, je le tempererais par un tres fort racisme des Hans a leur egard. « C’est normal qu’ils soient si pauvre. C’est de leur faute. Ils n’ont qu’a pas faire tant d’enfants. » J’ai toujours trouve ces discriminations tres marquantes, au quotidien. (Je travaillais dans un entrepot. Je n’etais donc pas entouree d’enfants de choeur 😉 )
Je suis bien d’accord avec vous : les photos de MMM sont magnifiques, elles me rendent régulièrement affreusement jalouses (mais lui se donne du mal pour les faire quand moi je me contente d’un clic-clac-merci-Kodak, là se situe sans doute le problème…).
Merci pour votre commentaire intéressant sur la (dé)considération des Hans vis à vis des minorités, c’est assez intéressant comme point de vue de l’intérieur. Quant au « ils n’ont qu’à pas faire tant d’enfants », ça renvoie à d’autres racismes sur d’autres parties de la planète (en France ?) mais aussi peut-être à une forme de jalousie face à l’inégalité vis à vis de la politique de l’enfant unique. Avant sa mise en oeuvre le nombre d’enfant moyen des femmes Han était de 8 (et la pauvreté du pays effroyable, certes)…
Magnifiques photos !!! Tu pourrais travailler à l’office du tourisme du Yunnan tellement tu nous donnes envie…
T’as raison, je devrais peut-être envisager de me faire rémunérer 😉
Bonjour, je découvre votre blog grâce à Jardin de Chine sur FB et comme je suis à l’affût de tout ce qui concerne la Chine et les différentes ethnies qui la compose, j’ai joué « ma curieuse » en venant sur votre blog! Tout d’abord je vous félicite pour la nouvelle venue Beauté Mandarine, car une naissance est toujours des moments d’exception tant par les émotions qu’elle engendre que par les bonheurs qu’elle procure!
Et en ce qui concerne mon intérêt pour la Chine, c’est tout simplement que mon fils aîné s’y est expatrié depuis une quinzaine d’années et que lors de ma première visite, des rencontres du bout du monde et de l’échange de deux cultures, le moment restera d’autant plus gravé dans ma mémoire.
Merci de vos belles photos de vos découvertes dans ce grand pays, j’espère un jour, aller à la rencontre de ces ethnies si riches en traditions et en couleurs… Nadine.
Bonsoir Nadine, et merci d’être passée par ici ! 15 ans en Chine, j’imagine que vous avez déjà eu l’occasion de voir plus que deux ou trois petits trucs lors de vos visites à votre fils ! Si vous avez le temps et l’envie je suis sûre que prendre le temps d’une ballade au Yunnan vous enchantera.
Et revenez vite sur le blog, il me reste encore au moins un ou deux billets à écrire sur le Yunnan 😉
Superbes photos! Je m’intéresse aussi beaucoup aux ethnies et à leur caractère authentique! Dans quels coins avez-vous ressentis le plus d’authenticité dans votre séjour? Y a-t-il d’autres villages que Mengla dans la région qui vous sont digne de mention pour aller à la rencontre des ethnies? Vous avez-faits des treks pour rejoindre les villages de ces peuples? Ça fait beaucoup de question je sais (!), mais votre article n’a fait qu’accentuer mon désir de visiter cette région! Au plaisir de vous lire encore! 😉
Bonjour Pierre-Luc, Mengla et la zone de Yuanyang nous ont paru les plus préservées sur notre parcours, mais il y a certainement des villages bien plus reculés encore (notamment dans l’ethnie Miao) qui sont bien mieux préservées du monde moderne. Pas de trek pour nous cette fois : nos enfants sont encore trop petits pour ça… A bientôt sur le blog alors.
Voyage formidable!!!!!!!!!!!!!! Un grand moment. Extrêmement marquant émotionnellement, culturellement et du point de vue des relations avec les gens. Merci pour toutes ces infos et les jolies photographies. Très authentique.